Où Charles de Gaulle célèbre la Révolution française et la République, tout en insistant sur les fragilités de cette dernière.
En septembre 1958, Charles de Gaulle affirme l'attachement de la nation française à la République mais réclame une nouvelle constitution, renforçant l'exécutif qu'il entend incarner. Pour lui, la République est la souveraineté du peuple, l'égalité politique et sociale, mais le régime - parce que trop démocratique ? - comporte des "vices" qui l'ont menée invariablement à sa perte.
C'est en un temps où il lui
fallait se réformer ou se briser que notre peuple, pour la première fois,
recourut à la République.
Jusqu'alors, au long des
siècles, l'Ancien Régime avait réalisé l'unité et maintenu l'intégrité de la
France. Mais, tandis qu'une immense vague de fond se formait dans les
profondeurs, il se montrait hors d'état de s'adapter à un monde nouveau. C'est
alors qu'au milieu de la tourmente nationale et de la guerre étrangère apparut
la République ! Elle était la souveraineté du peuple, l'appel de la liberté,
l'espérance de la justice. Elle devait rester cela à travers les péripéties
agitées de son histoire. Aujourd'hui, autant que jamais, nous voulons qu'elle
le demeure. Certes, la République a revêtu des formes diverses au cours de ses
règnes successifs. En 1792, on la vit révolutionnaire et guerrière, renverser
trônes et privilèges, pour succomber, huit ans plus tard, dans les abus et les
troubles qu'elle n'avait pu maîtriser.
En 1848, on la vit s'élever
au-dessus des barricades, se refuser à l'anarchie, se montrer sociale au-dedans
et fraternelle au-dehors, mais bientôt s'effacer encore faute d'avoir accordé
l'ordre avec l’élan du renouveau.
Le 4 septembre 1870, au
lendemain de Sedan, on la vit s'offrir au pays pour réparer le désastre.
De fait, la République sut
relever la France, reconstituer les armées, recréer un vaste empire, renouer
des alliances solides, faire de bonnes lois sociales, développer l’instruction.
Si bien qu’elle eut la gloire d’assurer, pendant la Première Guerre mondiale,
notre salut et notre victoire. Le 11 novembre, quand le peuple s’assemble et
que les drapeaux s’inclinent pour la commémoration, l’hommage que la patrie
décerne à ceux qui l’ont bien servie s’adresse aussi à la République.
Cependant, le Régime
comportait des vices de fonctionnement qui avaient pu sembler supportables à
une époque assez statique, mais qui n’étaient plus compatibles avec les
mouvements humains, les changements économiques, les périls extérieurs qui
précédaient la Seconde Guerre mondiale. Faute qu’on y eut remédié, les
événements terribles de 1941 emportèrent tout. Mais quand, le 18 juin, commença
le combat pour la libération de la France, il fut aussitôt proclamé que la
République à refaire serait une République nouvelle. La Résistance toute
entière ne cessa pas de l’affirmer.
Charles de Gaulle. Discours de la Place de la
République, le 4 septembre 1958
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